Article écrit par Elodie et Zayd, neurologue
«Docteur! Impossible de passer une nuit sans me réveiller! Le matin, je suis épuisé(e)!»
Dans les articles précédents, nous avons vu l‘importance du sommeil sur la Santé et les clés pour s’endormir facilement.
Ici, nous vous proposons de découvrir l’organisation du sommeil afin d’en optimiser les bienfaits sur votre Santé!
Vous êtes épuisés le matin, mais avez pourtant la sensation d’avoir bien dormi? Vous vous réveillez régulièrement et ne parvenez pas à vous rendormir? Vous êtes simplement très intéressés de découvrir les mystères de la physiologie du sommeil? Vous voudriez savoir comment dormir moins, mais mieux? Allons-y!
Les phases du sommeil
Vous avez sûrement déjà entendu dire que le sommeil est composé de cycles, de stades, etc. En effet, une fois endormis, nous vivons plusieurs “cycles” de 90 minutes (1 heure 30).
Au cours de chacun de ces cycles, les cellules du cerveau diminuent progressivement leur activité et émettent des ondes de fréquences de plus en plus basses pour descendre de plus en plus profondément dans le sommeil.
Sur cette base, ont été définis différents “stades” de sommeil. A la fin de chaque cycle, nous remontons en sommeil dit léger, avec parfois un micro-réveil, avant de replonger à nouveau.
Le graphique qui permet de visualiser ces différentes phases du sommeil s’appelle un hypnogramme. Ci-dessous, l’exemple d’une nuit avec un coucher vers minuit, quelques micro-réveils naturels et un réveil matinal vers 6h. Cette nuit de sommeil est composée de 4 cycles de 90 minutes.
“Est-ce qu’on rêve tout le temps?”
“Quel est le moment où le corps se repose le plus?”
“Quand je m’endors en classe, est-ce que j’ai vraiment dormi?”
“Est-ce vraiment grave de me laisser réveiller régulièrement par mon gsm, puisque je me rendors à chaque fois …”
Plongeons ensemble dans les différents stades pour y répondre!
Il est minuit, vous vous mettez au lit.
Éveil
Vous échangez un dernier mot, vous vous installez confortablement, initiez un dernier geste avant de fermer les yeux et de vous endormir.
Sommeil à ondes lentes (SOL): divisé en 3 phases
- Endormissement (Stade 1)
Votre respiration devient plus lente, vos muscles se relâchent avec parfois de petites contractions, votre conscience des stimuli extérieurs diminue. Vous ne faites plus attention au chien qui aboie dans la rue, à la machine à laver qui tourne (ni aux bruits de la télévision si vous étiez dans votre divan, à la voix monotone du professeur qui parle en classe, au livre dans vos mains si vous vous étiez endormis en lisant …).
C’est à ce moment que vous pouvez avoir l’impression de tomber dans le vide.
Cet état dure quelques minutes.
- Sommeil lent léger (Stade 2)
Vous entrez ensuite dans un sommeil léger. Les cellules du cerveau émettent des ondes à une fréquence qui signe une certaine activité mentale. Les insomniaques peuvent donc percevoir ce stade 2 comme un état d’éveil, alors qu’ils sont bel et bien endormis selon les définitions. Si vous avez des rêves en stade 2, ils sont plutôt calmes, avec du contenu socialement acceptable, des conversations …
À ce moment, il est encore facile de vous réveiller (votre fils qui rentre de sa soirée, un changement de ton du présentateur télé, le professeur qui vous interpelle par votre prénom, le livre qui glisse de vos mains …).
Durant cette phase, l’activité oculaire et musculaire se réduit encore. La digestion se fait plus facilement. Sa durée augmente de cycle en cycle au cours de la nuit (une quinzaine de minutes lors des 90 premières minutes de sommeil, puis 20 minutes, etc.). C’est dans cette phase que vous passez 50 % du temps de sommeil.
“Ma mère a le sommeil léger.” Oui… C’est surtout parce qu’elle est réceptive, la moitié de sa nuit, à votre retour tant attendu!
- Sommeil lent profond (Stades 3 et 4):
Vous entrez ensuite dans un sommeil plus profond. Votre cerveau émet à présent des ondes lentes et amples. Son activité se réduit au minimum. Les rêves, très simples à ce stade, sont plutôt des images, des pensées, des sensations qui reviennent.
Il est difficile de vous réveiller. Vous êtes isolés du monde extérieur.
C’est le moment du cycle où vous récupérez de la fatigue accumulée et vous vous réparez sur le plan physique. C’est aussi le moment de l’ancrage de la mémoire épisodique et de l’oubli des informations inutiles stockées pendant la journée (ce qui permet d’optimiser la consommation cérébrale d’énergie). Être systématiquement réveillé avant d’atteindre ce stade est donc très dommageable pour votre Santé!
La durée de cette phase diminue avec l’âge, et diminue de cycle en cycle.
Ainsi, elle dure environ 40 minutes lors du premier cycle chez un adulte moyen (plus chez un nourrisson, et moins chez une personne âgée), et se raréfie au fil de la nuit.
Ainsi, le sommeil lent profond, qui est le plus réparateur, représente environ 20-25 % du temps de sommeil total chez l’adulte (50 % chez le nourrisson).
Sommeil paradoxal (REM)
Vous arrivez maintenant au stade 5. Votre activité cérébrale a repris avec des ondes de fréquences proches de celles de l’éveil. C’est le moment où vous faites les rêves les plus longs et les plus élaborés. Associés à l’action (combat, sexe, conflit, aventure …), ils sont aussi les plus bizarres et remplis de rebondissements. Vos yeux font des mouvements rapides sous les paupières. C’est pour ça que ce sommeil est aussi appelé REM pour “Rapid Eye Movement”. Vous avez vraiment la sensation que ces rêves sont réels (même au réveil), car les différentes parties du cerveau (celle de la stratégie, celle des émotions, celle des mouvements, celle des couleurs, des sons, des textures …) sont activées. Ce que vous vivez est accepté comme crédible à votre esprit. (Nous reviendrons là-dessus dans l’article sur la visualisation).
Ce stade est appelé «paradoxal» car vous présentez simultanément des signes d’éveil (avec ces mouvements oculaires) et des signes de sommeil très profond. En effet, le système nerveux qui prédomine dans le corps à ce stade est le système parasympathique (celui du repos, de la régénération …). Vos muscles squelettiques (des jambes, des bras …) sont normalement dépourvus de tonus et votre métabolisme se fait tranquillement pendant que vous combattez les dragons dans votre esprit.
Si vous vous réveillez à ce moment (ou pendant le sommeil lent profond), vous serez conscients, avec les yeux bien ouverts, mais vos muscles resteront paralysés encore quelques minutes! Cela peut être terrifiant, avec même des hallucinations. On parle de paralysie nocturne (pour le stade 5) et de terreur nocturne (pour le stade 3-4).
Ce sommeil paradoxal représente environ 25% du temps total de sommeil. Sa durée augmente en fin de nuit. C’est pour ça que vous pouvez vous réveiller en vous souvenant que vous étiez en train de rêver. D’ailleurs, les rêves se transforment en cauchemars s’ils durent trop longtemps ou s’il y a trop de REM.
Et comme c’est aussi le stade des rêves érotiques et que c’est le système parasympathique qui domine, les érections péniennes et clitoridiennes sont fréquentes au réveil! Voilà, vous allez pouvoir faire les malins maintenant, avec cette info!
Après le stade 5, vous remontez parfois en stade d’éveil ou replongez pour un nouveau cycle: stade 1, stade 2, stade 3-4 … Et c’est reparti!
Et si vous êtes réveillés en plein milieu de la descente vers le sommeil profond (cfr. Ci-dessus, dans l’hypnogramme, dans le 3e cycle), le cycle est interrompu et vous remontez directement en phase d’éveil. Puis vous devez à nouveau replonger, stade après stade.
Sommeil = repos?
Comme nous venons de le voir, c’est principalement le sommeil à ondes lentes (SOL) et plus particulièrement le sommeil lent profond qui est reposant. En effet, durant le sommeil paradoxal, votre corps a beau être atone, les nerfs qui contrôlent vos muscles sont bien sollicités par les différentes aires cérébrales activées par vos rêves; surtout si vous imaginez que vous êtes un agent secret qui escalade les immeubles! Et puisque le SOL diminue en durée au fil de la nuit et que le REM augmente, dormir le plus d’heures possible n’est pas la meilleure stratégie pour être reposés.
Nous verrons dans l’article “Sommeil, partie 4: Quand et combien de temps dormir” quelques conseils pour programmer au mieux votre sommeil.
Les réveils nocturnes
Les micro-réveils naturels qui surviennent après une phase de sommeil paradoxal ne sont pas dommageables puisque vous avez fini un cycle. Vous ne vous en souviendrez même pas s’ils ont duré moins de 3 minutes.
Par contre, les réveils qui interrompent votre cycle, vous privent d’une partie du sommeil lent profond, le plus récupérateur. S’ils se multiplient, ils fragmentent véritablement votre sommeil et ont un impact négatif sur ses fonctions de régénération, ancrage de la mémoire …
En étant privés de sommeil paradoxal (car vous êtes systématiquement réveillés avant de l’atteindre), votre mémoire procédurale ne se fixe pas et donc vous n’ancrez pas vos apprentissages de la veille. Vous n’avez pas non plus la possibilité de faire baisser vos tensions psychiques dans les rêves avec un risque augmenté de dépression, d’irritabilité, de nervosité et de sautes d’humeur.
Trop souvent privés de stade 3-4, vous n’êtes physiquement et mentalement pas reposés le matin. Vous observez une prise de poids, une augmentation de la pression artérielle, une baisse de l’immunité, une accumulation du cholestérol, une diminution de l’apoptose (mort programmée) des vieilles cellules avec risque accru de développer des maladies dégénératives comme la maladie d’Alzheimer.
Voilà pourquoi éviter les réveils multiples et préserver l’architecture du sommeil est capital pour votre Santé!
Qu’est-ce qui vous réveille, vous, la nuit?
Voici une liste non exhaustive des différents stimuli mentionnés par mes patients en consultation avec des idées pour les éviter.
- Les stimuli sonores
– Un gsm qui vibre. Le mode avion est votre ami! (Le réveil fonctionne en mode avion, promis!)
– Des bruits extérieurs. Avez-vous déjà essayé les boules Quies, les tentures épaisses, ou le double vitrage?
– Un conjoint qui ronfle ou qui fait des apnées du sommeil. C’est dérangeant pour celui qui entend et celui qui les vit. Nous verrons plus loin ce qu’il en est et comment les éviter. Si la situation ne s’améliore pas, n’hésitez pas à faire chambre à part pour un sommeil de qualité et vous retrouver le lendemain, plus amoureux et reposés!
– Un bébé qui pleure. Il n’y a pas de solution unique, ni de solution miracle quand il s’agit de composer avec un être qui a des besoins et peu de moyens pour les faire comprendre. Chacun fait ce qu’il peut, fait de son mieux et c’est déjà très bien. Vous êtes de toutes façons des sur-hommes et des sur-femmes à ce moment-là! Mais certains parents attendent trop longtemps avant de demander conseils aux sages-femmes – les mères du monde -, ou de demander de l’aide à leurs proches. Faites de votre sommeil votre priorité car il est capital pour votre Santé et celle de votre enfant!
- Les stimuli physiques
– Un conjoint qui remue. Optez pour un matelas plus large, ou pour deux matelas, ou choisissez de faire chambre à part pour dormir…
– Une literie peu confortable. Investir dans votre literie (un oreiller qui épargne la nuque, un matelas bon pour le dos …), c’est éviter de futures dépenses pour vous soigner!
– Avoir trop froid, trop chaud. Allez courage! Levez-vous et allez ouvrir/fermer cette fenêtre dès le premier réveil! Pour rappel (cfr. Article “Sommeil, partie 2”), la température idéale pour une chambre à coucher est de 18 à 20°C pour un sommeil de qualité.
– Les animaux de compagnie qui miaulent, qui montent sur le lit… Leur interdire l’accès à la chambre, bien que ça puisse être difficile, est une promesse de meilleure nuit.
- Les stimuli visuels
– Le gsm qui s’allume à chaque notification- La lumière du soleil levant, ou de la lune qui tourne. Tentures, volets, masques pour les yeux peuvent parfois éviter de consulter…
- Les stimuli internes
– Les fringales nocturnes dues à un manque de sucre dans le sang (hypoglycémie). Ce n’est pas normal. Il faut en parler à votre médecin. En attendant, gardez un petit biscuit sur la table de nuit, pour ne pas devoir vous relever et stimuler davantage votre cerveau encore somnolent.
– Les crampes musculaires. Cauchemar pour beaucoup de gens, elles surviennent principalement dans les jambes. Les crampes sont des contractions musculaires spontanées, douloureuses et brèves, favorisées par le manque d’ions (sodium, potassium, calcium, magnésium …) dans le sang. Pour les éviter, veillez à bien vous hydrater et vous étirer après les exercices physiques!
– Les besoins d’uriner (envies mictionnelles). Certaines personnes se lèvent jusqu’à 4-5 fois par nuit pour aller faire pipi. Je conseille souvent à mes patients de commencer par arrêter de boire après 20h et de vider leur vessie avant d’aller se coucher! C’est parfois aussi simple que ça. Mais ça peut aussi être provoqué par une augmentation du volume de la prostate, une infection urinaire, une hypersensibilité de la vessie … Il est donc judicieux de consulter un urologue (médecin spécialiste du système urinaire) si cela perdure. En attendant, et pour écourter votre éveil, le pot de chambre vous évite d’aller jusqu’aux wc.
– Les cauchemars. S’ils sont fréquents et terrorisants au point de vous garder éveillés longtemps, il peut être bon de rencontrer un professionnel pour libérer une angoisse, une peur, une tension …
– La toux nocturne: elle peut être le signe d’une allergie aux acariens ou d’un reflux gastro-oesophagien (dont nous parlerons dans le prochain article).
– Les douleurs ostéo-articulaires: douleur dans la nuque, le dos, les poignets … Si votre literie est bonne et que l’ostéopathie ne vous a pas soulagé, parlez-en à votre médecin. Elles peuvent signer une pathologie sous-jacente qui peut être traitée!
– Un prurit nocturne: « Ça gratte, ça gratte!”. Gale, acariens, puces de lit, urticaire … À investiguer!
– Le manque d’oxygène: un cerveau qui manque d’oxygène et qui perçoit une augmentation relative de CO2, provoque le réveil afin de prendre une grande inspiration et de se réoxygéner. Il est donc important de bien aérer la chambre et de détecter les apnées du sommeil (arrêt respiratoire transitoire).
Les apnées du sommeil: très fréquentes dans la population, elles sont souvent négligées. Si quelqu’un vous a déjà dit que vous ronflez, que parfois vous vous arrêtez de respirer pour reprendre ensuite une grande inspiration, si vous êtes épuisés le matin sans comprendre pourquoi, vous faites certainement des apnées du sommeil. Voici un petit test à réaliser pour évaluer votre risque: (https://lausanne-nosas-score.com/test-apnee-sommeil/).
Les apnées surviennent quand les poumons reçoivent moins d’oxygène car
- La langue bascule en arrière et obstrue la trachée, principalement si vous dormez sur le dos ou après avoir bu de l’alcool qui augmente la relaxation des muscles de la gorge
- la trachée est comprimée par une masse adipeuse dans le cou trop importante …
Que faire pour éviter ces apnées?
– Perdre du poids pour libérer les voies respiratoires
– Eviter l’alcool et le tabac en soirée
– Dormir sur le côté droit (une des meilleures positions pour le cœur), sur le côté gauche (si vous souffrez de problèmes d’estomac ou si vous êtes enceinte pour éviter de comprimer la veine cave), ou sur le ventre (attention aux pressions supplémentaires sur le cou). Plusieurs techniques existent pour ne pas basculer sur le dos! Vous connaissez celle des balles de tennis cousues dans le dos du pyjama?
– Utiliser un masque qui envoie de l’air dans les voies respiratoires avec une certaine pression pour les garder tout le temps ouvertes. Discutez-en avec votre médecin.
Et une fois réveillé, que faire?
Ne regardez pas l’heure, n’allumez pas la lumière, ne regardez pas votre gsm!
Essayez d’accueillir paisiblement ce réveil et de respirer calmement.
Si malgré tout, le flux de vos pensées redémarre en trombe, il est alors très compliqué de se rendormir.
Plusieurs techniques s’offrent à vous
- Écrire vos pensées envahissantes et stressantes pour faire le vide. Vous reviendrez dessus le lendemain (cfr. Article “Le bullet journal”).
- Ecouter de la musique douce, de l’ASMR (bruits relaxants), … pour vous apaiser.
- Sortir du lit, quitter la pièce et faire une activité non stimulante en attendant la prochaine vague de somnolence (cfr. Article “Sommeil, partie 4”). Certains lisent, font des exercices de respiration (cohérence cardiaque), méditent … Pour rappel, la nicotine des cigarettes et la lumière bleue des écrans sont stimulantes. Elles sont donc à éviter à ce moment-là!
- Si vous avez suffisamment dormi (cfr. Article “Sommeil, partie 4”), il vaut mieux vous lever et commencer votre journée, plutôt que de repartir dans un cycle et d’en être sorti brutalement par le réveil; ce qui vous laissera vaseux le reste de la matinée.
- Et vous? Avez-vous des techniques à nous partager pour gérer les insomnies? Nous les ajouterons!
Vous avez maintenant plusieurs clés pour passer une nuit de qualité!
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Praticienne en naturopathie et réflexologie